Discrimination sur l’âge, le genre, l’origine… Au Canada, des internautes se liguent contre le ciblage publicitaire de Facebook

Nous vous proposons cette excellente contribution de Libération

Une cour d’appel du Québec a approuvé un recours collectif contre Facebook, accusant le réseau social de discrimination sur l’âge, le genre ou l’origine dans son ciblage publicitaire.

Un casque à micro sur les oreilles, une jeune femme affiche un large sourire au milieu d’un open space. «Aidez-nous à créer un quotidien meilleur en rejoignant notre centre d’appel à Montréal», enjoint cette annonce publicitaire Facebook signée Ikea. Mais pour créer ce «quotidien meilleur» et espérer être recruté, il faut avoir moins de 40 ans. La limite d’âge vous paraît injuste ? L’entreprise d’ameublement l’a pourtant explicitement stipulée dans les critères de son ciblage publicitaire que l’on peut découvrir dans les paramètres de la publication. Mais les choses pourraient bientôt changer.

La Cour d’appel du Québec (Canada) a approuvé un recours collectif contre Facebook, accusant le réseau social de discrimination sur l’âge, le genre ou l’origine dans son ciblage publicitaire, a indiqué mercredi l’avocate des plaignants. Le géant californien des réseaux sociaux pourrait devoir payer des dommages à des milliers de Québécois qui ont utilisé depuis 2016 la plateforme pour chercher emplois et logements et se seraient vus cacher des annonces en raison de ces critères discriminatoires.

«Nous sommes heureux de l’arrêt de la cour d’appel du Québec», a salué l’avocate des plaignants, Audrey Boctor, évoquant des «pratiques discriminatoires répandues». Selon CBC News, la plainte porte sur une stratégie publicitaire précise, celle du microciblage. On traduit : bien que les annonces apparaissent identiques à toutes les autres, elles ont été en réalité conçues pour ne figurer que dans les fils d’actualité Facebook de personnes précises, au profil recherché. Par conséquent, dans certains cas, une femme peut ne pas voir une annonce visant les hommes. «La discrimination algorithmique qui empêche certains groupes de personnes, comme les femmes et les travailleurs plus âgés, de recevoir des annonces d’emploi n’est qu’une forme moderne du même type de discrimination qui est interdit en vertu de la Charte québécoise», a déclaré l’avocate dans un courriel.

Le recours collectif avait été lancé en 2019. A cette époque, CBC News révèle que près d’une centaine d’employeurs (comprenant des ministères) publient des offres d’emploi sur le réseau social jugées illégales par certains experts. En effet, les lois canadiennes sur les droits de la personne soulignent que les employeurs ne peuvent pas restreindre l’accès aux offres d’emploi en fonction de l’âge, du genre, de l’origine ou de la religion d’une personne. Sauf dans des circonstances professionnelles particulières.

En réaction, Facebook a commencé à appliquer de nouvelles règles en décembre 2020. Pour les annonces d’emploi, de logement et de services de crédit, les annonceurs ont désormais interdiction de cibler sur des critères d’âge, de genre ou de code postal. Pour le reste, ils peuvent continuer. En juillet 2021, une juge de la Cour supérieure du Québec a finalement refusé le recours collectif au motif que le groupe de plaignants impliqué était trop large. Des milliers voire des millions de personnes pouvant être concernées. C’est cette décision que la Cour d’appel du Québec a finalement renversé.

Un énième coup dur pour Meta qui, pas plus tard que mercredi, a écopé de deux lourdes amendes totalisant 390 millions d’euros pour violation du règlement européen sur les données (RGPD). Contactée par l’AFP, Meta, la maison mère de Facebook, n’a pas souhaité commenter la décision de la cour d’appel du Québec mais a assuré avoir pris des mesures «pour promouvoir la non-discrimination et l’équité dans (ses) systèmes publicitaires». Le groupe a également fait face à des poursuites similaires aux Etats-Unis. En juin, l’entreprise avait accepté de changer ses méthodes de ciblage publicitaire et de payer 115 054 dollars d’amende pour mettre fin à des poursuites du gouvernement américain, qui l’accusait de faciliter des discriminations raciales et et de genre.

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